Focus] Couvre-feu, fermeture marchés et mosquées, transport réduit… : Le confinement officieux !

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La pandémie du Covid-19  qui est en train de secouer le monde n’a pas épargné le Sénégal. Si dans les pays les plus touchés le confinement a été décrété, au Sénégal on semble opter pour la même méthode, sans le dire. Couvre-feu, fermeture de marchés, réduction transport…, une batterie de mesures est prise, constate un spécialiste, pour enfermer officieusement les citoyens à domicile.  
 
 
 
Le 2 mars 2020, le Sénégal enregistre son premier cas officiel de coronavirus. Mais la situation semble vite maîtrisée. Les cas qui vont suivre seront aussi moins problématiques. Jusqu’au jour où un Modou-Modou (émigré) résident à Touba introduit le virus dans la ville  Sainte  avant de contaminer sa femme, son  enfant, sans compter les cas contacts au nombre de 71. Tel un couperet, la nouvelle  tomba sur la tête des  Sénégalais, et installe la  psychose. 
 
Depuis lors, la situation n’a cessé de se dégrader. C’est ainsi que le président de la République a commencé à durcir les mesures. Le 14 mars, Macky Sall a pris 5 mesures draconiennes dont l’annulation pour une durée de 30 jours de toutes les manifestations publiques, la fermeture du port pour les bateaux de croisière, et la fermeture des écoles, universités et crèches pour 3 semaines.
 
Des décisions que les Sénégalais dans leur écrasante majorité avaient salué car, disaient-ils, ces mesures pourraient contribuer à l’endiguement de la pandémie du Covid-19. Mais quelques jours après, il s’est avéré que les mesures sont presque sans effet. En réalité, l’ouverture des frontières terrestres et surtout aériennes constitue une porte d’entrée grandement ouverte pour le virus.
 
Le 23 mars 2019, après 71 malades sous traitement, la multiplication des cas contacts et surtout la transmission communautaire, le chef de l’Etat, à travers une déclaration à la Nation, passe à la vitesse supérieure.  Pour la troisième fois de son histoire, le Sénégal déclare l’Etat d’urgence. Une décision accompagnée par une batterie de mesures dont le couvre-feu de 20 heures à 6 heures du matin.
 
Déclaration de l’Etat d’urgence et le couvre-feu
 
« Ce soir, je vous dis mes chers compatriotes que l’heure est grave. La vitesse de la progression de la maladie nous impose de relever le niveau de la riposte. A défaut, nous courons un sérieux risque de calamité publique. En conséquence, en vertu de la loi 69-29 du 29 avril 1969, à compter de ce soir, je déclare l’état d’urgence sur  l’étendue du territoire », avait déclaré le Président le chef de l’Etat.  Dans son discours, Macky Sall avait déjà préparé les Sénégalais au confinement. L’expression qui revenait le plus était : « Restez chez vous ! »
 
Depuis ce jour, la course aux mesures drastiques est lancée. Du côté des ministres, maires et chefs d’entreprises. Chacun cherchant à s’aligner au mieux à la nouvelle directive : « Restez chez vous ! »
 
Le ministre du Transport terrestre annonce l’interdiction du transport interurbain et réduit drastiquement l’offre de transport dans les villes, Dakar en particulier. « Désormais, seule la moitié du nombre de places indiqué sur la carte grise est autorisée », déclare Oumar Youm, lors d’une conférence de presse co-animée avec son collègue de l’Intérieur.
 
Fermeture des restaurants, hôtels,  gares, lieux de réunion et lieu de culte
 
Sur la même lancée, le ministre de l’Intérieur Aly Ngouille Ndiaye a demandé la fermeture des restaurants, hôtels et tous les lieux de regroupement susceptibles d’attirer du public.
 
Dans la foulée, des maires ont pris la décision de fermer les marchés hebdomadaires. Poussant le bouchon plus loin, certains maires ont annoncé la fermeture des marchés sur le territoire de leur commune.  Le 19 mars 2020, Bamba Fall, l’édile de la Médina a décidé de fermer le célèbre marché Tilène, et Champs de courses, à partir de 18 heures. A Kaolack, la mesure est encore plus radicale, avec des commerces fermés à 14 h.
 
Dans la nuit du 24 au 25 mars, la répression violente des forces de l’ordre face aux récalcitrants du couvre-feu, constitue une preuve parfaite qu’il n’est permis à aucune silhouette de trainer dans les rues au-delà de 20h.
 
«On peut confiner les Sénégalais sans user du mot »
 
Enfermé la nuit, le Sénégalais voit sa mobilité et sa marge d’activité ainsi que son espace très réduits durant la journée. Psychologue, Abdoulaye Cissé est convaincu que le confinement  en tant que tel n’est pas adapté aux réalités sociologiques du pays.
 
« On est dans une société à solidarité mécanique. Dans les modèles  de sociétés à solidarité mécanique, la cohésion est très forte et la vie communautaire prédomine sur la vie individuelle.  Dans ce type de société, il serait extrêmement difficile de vouloir imposer ou instaurer le confinement des populations. Et c’est difficile même de vouloir l’imposer ».
 
A son avis, l’astuce que l’Etat peut trouver, c’est d’abord déclarer l’état d’urgence. « On peut confiner les Sénégalais sans user du mot et sans faire recours à la pratique en tant que telle. Tout le monde sait que dans le contexte sénégalais et dans  le contexte africain, cela n’allait pas être facile voire impossible de le faire.
 
Parce qu’on a tendance, le matin au réveil, de voir la maison d’en face, saluer le grand père. Donc il y a des interrelations entre les voisins et le confinement n’est pas adapté à certaines pratiques. Et quand l’Etat a déclaré l’Etat d’urgence, à tout moment, les forces de sécurité et de défense peuvent venir demander aux uns et aux autres de rentrer dans leurs maisons », explique-t-il.
 
Dans tous les cas, même si les autorités évitent soigneusement de parler de confinement, le constat est là : les Sénégalais sont presque contraints de rester chez eux, nuit et jour.
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