Notre pays célèbre, ce samedi 4 avril, le soixantième anniversaire de son indépendance, dans un contexte particulier marqué par la pandémie du Covid-19. Prétexte pour Seneweb de jeter un regard sur la place de la médecine militaire dans la gestion des récentes épidémies comme l’Ebola ou encore le choléra.
Les forces armées, tout comme le corps de la santé publique, ne sont pas en reste dans cette bataille médicale enclenchée depuis quelques semaines par les autorités étatiques contre la pandémie du coronavirus qui est en train de gagner du terrain dans le pays. Mais, bien avant l’arrivée de ce redoutable virus (2 mars 2020), les soldats sénégalais semblaient avoir déjà pris leurs devants.
Dans un document récapitulatif de la direction de la santé des armées, consulté par Seneweb, il est mentionné que « dans le cadre d’une volonté d’anticipation, les forces armées sénégalaises ont mis en place une stratégie de préparation à la gestion des crises dont les épidémies ».
23 médecins et 20 infirmiers militaires déployés
En tout cas, pour participer à « l’effort de guerre », l’armée nationale a sorti sa grosse artillerie sanitaire. Elle a, en effet, déployé, en mi-mars à Touba, un hôpital de campagne niveau 2 d’une capacité de 24 lits avec un personnel de 80 militaires dont 13 médecins (vétérinaire, pharmacien et dentiste compris) et 20 infirmiers, pour, nous dit-on, suppléer et renforcer l’offre de service de soins dans le district. Cette mesure « urgente » s’expliquait par le fait que la capitale du mouridisme avait été l’épicentre de la maladie avec l’arrivée du patient ‘’Modou-Modou », qui avait fini de contaminer près de 20 personnes. A la date du 1er avril 2020, quelque 9 des 19 patients du covid-19, traités à Touba, sont déclarés guéris et la ville sainte ne compte plus de cas, depuis 10 jours, selon les autorités médicales locales.
Mais d’après toujours des informations obtenues par Seneweb de la direction de la santé des armées, celles-ci ont mis à la disposition du ministère de la Santé 9 autres médecins en guise d’appui au personnel de santé au niveau des sites de prise en charge des cas de Covid-19. Hormis ce dispositif, un autre médecin infectiologue de HPD, « avec une expertise avérée dans la lutte contre les épidémies », a été également mis à la disposition du Comité national de gestion des épidémies (Cnge).
Par ailleurs, il faut signaler que les armées agissent également dans la prise en charge psychologique des malades du Covid-19, rappelle en tout cas le médecin colonel Malick Samba Diène. Qui révèle à Seneweb que « le programme de soutien psychologique des armées participe activement à la formation des acteurs dans la lutte pour la prise en charge psychosocial des malades et des contacts, pour empêcher la panique et renforcer l’application des mesures préventives ».
Sécurité des zones affectées
Parallèlement à cet aspect médical, les soldats sénégalais accomplissent, naturellement, une mission sécuritaire, depuis le début de l’apparition du virus, le 2 mars dernier. En effet, notre interlocuteur de rappeler que l’armée et la gendarmerie nationale appuient le ministère de l’Intérieur et de la Sécurité publique dans la mise en œuvre des mesures prises par le chef de l’Etat, Macky Sall, dans le cadre de la lutte contre la propagation du Covid-19. Egalement, « elles sont chargées de faire respecter les quarantaines et les couvre-feux et de gérer plusieurs points de contrôle afin de juguler, voire d’interdire, la libre circulation des personnes dans l’espoir d’endiguer la propagation de la maladie ».
D’après toujours nos informations, dans le cadre de la lutte contre le coronavirus, les forces de défense prennent part aux instances de prise de décisions et de coordinations à différents niveaux du commandement territoriale.
Ainsi, le Chef d’état-major des armées (Cemga) et le ministre des Forces armées interviennent quotidiennement au niveau de la cellule de crise interministérielle affiliée à la présidence de la République qui assure la coordination politique et décisionnelle de la riposte.
Pendant ce temps, le conseiller santé du ministère des Forces armées intervient au niveau du Secrétariat général du gouvernement qui assure le secrétariat permanent du haut conseil de la sécurité sanitaire mondiale « One Health ». Ce conseil appuie la coordination politique et décisionnelle dans la mise en œuvre des recommandations à travers ses groupes thématiques.
Le directeur du service de santé des armées, pour sa part, « agit » au niveau du comité national de gestion des épidémies au niveau du ministère de la Santé et de l’Action sociale. Cette instance assure, à travers ses commissions, la coordination stratégique de la préparation et de la riposte.
Pour ce qui est du médecin-chef des armées, il est membre actif au Centre des opérations d’urgence sanitaire (Cous) qui assure la coordination opérationnelle avec mise en place d’un gestionnaire d’incident qui se réunit tous les jours et rend compte quotidiennement de l’évolution des activités des différentes commissions au CNGE pour les orientations idoines.
A cela, s’ajoute le rôle de l’Hôpital principal de Dakar (Hpm) qui, à l’instar de tous les établissements publics de santé hospitaliers, compte un comité de gestion de l’épidémie. D’ailleurs, il ressort de nos investigations, qu’il a été choisi comme site de traitement et assiste le Cnge par la mise à disposition d’un infectiologue expert de l’Oms dans la lutte contre les épidémies.
Les épisodes Ébola, choléra…
D’après un document de la direction de la santé des armées sénégalaises, cette même organisation a été à peu près adoptée lors de l’épidémie de maladie à virus Ebola, en 2014.
Ainsi, selon ces informations, elle avait participé à l’élaboration du plan de riposte nationale, pris part aux réunions du Comité national de gestion des épidémies, adhéré aux comités locaux de lutte contre les épidémies.
Mais aussi, avec l’appui de Médecin sans frontières, notre armée s’était largement investie dans la formation des formateurs nationaux sur l’infection à virus Ebola (avec un seul « cas importé » finalement guéri.
« On avait participé à la mission conjointe de supervision et d’évaluation du dispositif de riposte des régions de Tamba, Kédougou, Kolda, Sédhiou et Ziguinchor, et mis à disposition à la base aérienne militaire Andalla Cissé d’un espace pour la mise en place d’une base logistique et un corridor humanitaire. A cela, il faut ajouter la mise en place du centre d’isolement et de traitement des cas suspects d’Ebola à Kalifourou (frontières guinéennes », souligne le médecin colonel Malick Samba Diène, officier-adjoint.
Et le même modus operandis a été utilisé lors des différentes épidémies du choléra notamment, en 1994-1995 et en 2004, informent nos sources de la santé militaire qui soulignent que « les forces armées ont toujours été au rendez-vous lorsque la santé publique est menacée ».
« L’armée sénégalaise, avec ses capacités et par son attachement au concept armée-nation, a toujours participé à la riposte contre les épidémies en jouant son rôle dans la mission qui lui est confiée dans la riposte » soutient pour s’en réjouir, le médecin colonel Malick Samba Diène.