Le président de la Commission de l’Union africaine estime qu‘’une entreprise intellectuelle, morale et politique’’ est indispensable pour ’’une véritable renaissance’’ du continent 57 ans après la création de l’OUA devenue Union africaine en 2002.
Le 25 mai est consacrée Journée internationale de l’Afrique, pour commémorer le congrès fondateur de l’Organisation de l’unité africaine (OUA), devenue l’Union africaine (UA).
Le congrès au cours duquel a été fondée l’OUA a eu lieu en 1963 à Addis-Abeba, en Ethiopie, sous le parrainage de Haïlé Sélassié, alors empereur de ce pays. L’OUA regroupait à l’époque 32 Etats africains indépendants.
‘’Il n’y a pas plus honorable célébration de la journée de l’Afrique que d’engager cette entreprise intellectuelle, morale et politique, indispensable pour une véritable renaissance de notre cher Continent’’, a dit le président de la Commission de l’Union africaine.
Pour Moussa Faki Mahamat, ‘’cette date, considérée comme la journée mondiale de l’Afrique, est, comme toutes les fêtes d’envergure, un moment de joie, de fierté mais aussi de recueillement et de méditation’’.
57 ans après l’acte fondateur, l’Afrique s’est affranchie de la présence coloniale et de l’apartheid, amorçant son unité politique et de grands progrès économiques, sociaux et culturels. ’’De tels progrès ne sauraient occulter les insuffisances et les retards parfois patents’’, note le Tchadien dans sa déclaration.
’’De nombreuses questions nous assaillent toujours, non sans angoisse. L’Afrique est-elle devenue ce continent de liberté, de paix, de prospérité et de réussite dont les pères fondateurs avaient rêvé ? Les Africains sont-ils plus unis, plus solidaires et plus épanouis ? L’Afrique a-t-elle conquis la place à la mesure de son immense potentiel et de ses ambitions légitimes, sur la scène internationale ?’’, s’interroge t-il.
Selon lui, ‘’le bilan d’un demi-siècle d’indépendance et de liberté du Continent laisse dubitatif’’.
Il relève qu’en dépit d’un potentiel économique considérable, d’un capital humain riche, jeune et dynamique, ‘’la majorité des Etats africains peinent à assurer le bien-être de leurs populations’’.
‘’Des secteurs vitaux tels que l’éducation, la santé et la sécurité dépendent en grande partie de l’aide extérieure’’, note t-il, ajoutant que ‘’le communautarisme et le tribalisme se sont davantage cristallisés à la faveur d’un multipartisme et des principes démocratiques parfois dévoyés’’.
Le président de la Commission peint un tableau marqué par ‘’des crises ouvertes, générées par le terrorisme et des conflits interethniques ou interconfessionnels aux crises post- électorales, l’Afrique offre toujours, ici ou là, des scènes de violences, de fragilités et d’incertitudes du lendemain’’.
Il s’est dit ‘’profondément meurtri par le spectacle qu’offre en ce moment l’un des membres fondateurs de l’OUA et principal initiateur et artisan de l’Union africaine, la Libye’’.
En dépit de ‘’ce décor mitigé’’, des lueurs d’espoir transparaissent tout de mêmes, selon Moussa Faki Mahamat, estimant que ‘’la volonté de vaincre la fatalité est grande et les moyens de briser le cercle de la dépendance et de la pauvreté sont significatifs’’.
Selon lui, ‘’des évolutions positives, des dynamiques nouvelles, des volontés farouches, des réussites spectaculaires ne cessent de s’affirmer et de baliser les chemins du futur’’. Il a notamment salué la construction des organisations régionales se construisent, l’avènement de la Zone de libre-échange continentale(ZLECA).
Parlant de la pandémie du Coronavirus, le président de la Commission note que l’Afrique, ‘’à la grande surprise de ceux qui l’on toujours peu considérée, s’est mobilisée aux premières heures du déclenchement de la pandémie’’.
Il invite cependant à ‘’redoubler d’efforts, de détermination et de persévérance dans l’application stricte des piliers de cette stratégie’’. Il estime qu’il ‘’nous faut aller au-delà de la conjoncture, en nous préparant aux conditions du monde post pandémie’’.
Moussa Faki Mahamat souligne que ‘’dans un monde où le multilatéralisme est soumis à rude épreuve, l’Afrique doit cesser d’attendre son salut des autres’’.
’’L’Afrique ne peut plus se complaire dans ce rôle d’éternel réservoir pour les uns, de dépotoir pour les autres’’, dit-il.
L’Afrique ‘’est instamment interpellée pour tracer sa propre voie’’, selon le président de la Commission, ajoutant que ‘’sa dépendance et son insécurité alimentaires sont inadmissibles et intolérables ; de même qu’il en est de l’état de ses infrastructures routières, portuaires, sanitaires et éducatives’’.
Il a souligné l’importance de décider en toute lucidité et courageusement, d’une approche innovante, plus introvertie qu’extravertie. ’’Vivons de ce que nous avons, par ce que nous avons ; vivons aux dimensions de ce que nous avons !’’, a-t-il indiqué.
Le diplomate tchadien estime qu’en s’engageant dans cette voie, les dirigeants du continent ‘’seront plus proches’’ de leurs citoyens, les Etats nationaux ‘’plus forts’’.
‘’Ce mouvement d’introversion et d’appui sur nos propres forces, je le vois comme un catalyseur d’une nouvelle renaissance de nos Etats nationaux. C’est dans l’épreuve que les Nations et les Etats se construisent vraiment’’, soutient le Tchadien.
Selon lui, ‘’la grande question que nous rappelle cette pandémie de Covid 19, avec une voix assommante, est cette impérieuse nécessité de rompre cette dépendance de l’extérieur par le double impératif de vivre de nos propres ressources et de nous orienter hardiment vers la voix de notre propre industrialisation’’.
Il rappelle que ‘’des ensembles moins nantis’’ que l’Afrique ‘’l’ont réussi dans des temps record’’.
Dans sa déclaration, le président de la Commission ‘’invite avec empressement les femmes, la jeunesse, les intellectuels, les académiciens, les universitaires les hommes politiques, les hommes d’affaires et les vaillants militants de la société civile à engager une réflexion féconde et active sur cette question centrale pour notre survie matérielle, notre indépendance, notre liberté et notre dignité’’.
‘’La seule façon de contenir Covid 19 et ses conséquences désastreuses, d’assurer notre suffisance alimentaire, de créer des millions d’emplois, de sauver les centaines de millions de nos citoyens aujourd’hui gravement exposés aux pandémies et aux aléas de toutes sortes, est celle d’un vrai sursaut solidaire pour une réelle résilience africaine forte et durable’’, écrit-il.