Avec une mortalité possible de 10% due aux conditions d’hygiène précaires et aux systèmes médicaux défaillants, l’Afrique risque gros face au coronavirus.
De plus, d’après les dernières observations, la transmission du virus des patients aux médecins traiteurs s’opère avec une facilité déconcertante. Du moins, c’est ce que rapporte Le Monde Afrique.
La situation pourrait se dégrader rapidement sur le continent selon des virologues africains. Cette perspective concorde avec la mise en garde du Directeur général de l’Organisation Mondiale de la Santé (Oms), Tedro Adhanom Ghebreyesus : « l’Afrique doit se préparer au pire », s’est-il inquiété lors d’une conférence de presse en ligne le 18 mars.
Manque criard de matériel
« Même en Afrique du Sud où les systèmes de santé public et privé sont parmi les plus développés du continent, ce sera un défi. Car il y a trop peu de lits dans les hôpitaux en Afrique », constate Matshidiso Moeti, directrice régionale de l’Oms pour l’Afrique. Il y a également un manque considérable de kits de dépistage du coronavirus.
En février dernier, seuls le Sénégal et l’Afrique du Sud possédaient des laboratoires capables de diagnostiquer le Covid-19. Néanmoins, depuis la propagation fulgurante du virus, au moins quarante laboratoires ont vu le jour sur le sol africain, dont trois au Nigéria.
La Chine, dans un élan de solidarité, a fait des dons massifs de masques et de matériel en tout genre à l’Afrique pouvant servir à endiguer la pandémie. L’ensemble médical sera acheminé à Addis-Abeba en Ethiopie, où les autorités locales se chargeront de trouver des canaux de distribution pour dispatcher les dispositifs à leurs voisins.
Un bilan très instable
A ce jour, le bilan en Afrique suscite anxiété et interrogations, avec plus de 640 personnes infectées et 17 morts. Pour couronner le tout, nul ne peut affirmer que les chiffres sont en phase avec la réalité quand on sait que des individus peuvent contracter le virus sans avoir de symptômes pendant deux semaines, et que les tests sont relativement lents et aléatoires.
« A l’évidence, des personnes n’ont pas encore été détectées », a avoué John Nkengasong, virologue camerounais et directeur du Centre africain de prévention et de lutte contre les maladies (CDC Afrique) de l’Union Africaine. Une révélation que l’Oms aurait du mal à admettre officiellement, afin d’éviter la psychose.
Et il y a de quoi s’inquiéter : avant-hier, la ville de Kinshasa (RDC) a enregistré 14 cas supplémentaires, soit le double de la veille. Dans ce pays d’Afrique centrale parmi les plus pauvres du monde, les centres hospitaliers sont dans un état de « délabrement avancé ».
Selon l’Unicef, 63% des Africains habitant les métropoles ne peuvent même pas se laver les mains avec du savon, sans oublier les conditions d’accès à l’eau potable très souvent compliquées. La lutte de l’Afrique contre le coronavirus, sans vouloir être pessimiste, semble à peine commencer. Il va falloir être solidaires et disciplinés afin de vaincre l’un des plus féroces « ennemis de l’humanité ».