Des intellectuels demandent aux chefs d’Etats de ne pas répondre à l’appel de Macron jugé arrogant
Lors du récent sommet de l’OTAN tenu à Londres les 3 et 4 décembre 2019, le président français Emmanuel Macron a directement interpellé les chefs d’État du G5 Sahel au sujet d’une ambiguïté qui existerait entre la présence de forces militaires françaises dans le Sahel et l’expression de «mouvements anti-français» en Afrique francophone.
Il s’est également permis de convoquer tous les chefs d’État du G5 Sahel en France, plus précisément à Pau, le 16 décembre prochain, pour les entendre « clarifier leur demande à l’égard de la France et de la communauté internationale » concernant la présence des forces militaires françaises dans cette zone.
L’opinion publique africaine a été ainsi choquée et outrée par le ton des propos et par la manière dont le président français s’est adressé à ceux qu’il aurait dû considérer comme ses pairs.
C’est ce qui a donc poussé les organisations africaines que sont : le Groupe de travail du Rapport Alternatif Sur l’Afrique ( RASA) – Afrique),
Leadership, Ethique, Gouvernance et stratégie pour l’Afrique (LEGS- Africa), Africtivistes, réseau des bloggers et activistes africains, MÉMOIRES et PARTAGES (Bordeaux, France), Cercle Humaniste d’Engagement et de Réflexion pour l’Avenir de l’Afrique (CHERPAA- Paris, France), Magazine Continent Premier (Suisse) Groupe de Recherches et d’Initiatives pour la Libération de l’Afrique ( GRILA- Canada), de monter au créneau pour se désoler de cette posture du président Français Emmanuel Macron.
Elles condamnent fermement cette attitude arrogante du Président Emmanuel Macron, qu’elles perçoivent comme « un manque de respect vis-à-vis des chefs d’État des pays cités et de leurs peuples », voulant rappeler ainsi au Président Macron que les pays Africains font partie de la « communauté internationale » dont il s’improvise porte-parole sans être mandaté à cet effet. Les peuples africains réclament depuis longtemps l’abolition des relations néocoloniales entre la France et ses anciennes colonies, lesquelles s’exercent à travers le franc CFA, les accords économiques et financiers léonins, les accords de défense iniques, le soutien aux régimes dictatoriaux, la présence de troupes françaises, etc…
À travers ses interrogations, ces organisations restent sceptiques quant au goût du président de manifester réellement le désir de voir la présence de ces pays. En plus, cela suscite même des interrogations sur la question lancinante à laquelle les dirigeants africains ont été confrontés au congrès du Parti pour le Rassemblement Africain de Cotonou en juillet 1958 et à la conférence de Brazzaville en Août 1958 : choisir entre une indépendance immédiate des États d’Afrique francophone et la perpétuation d’une communauté déséquilibrée et asymétrique avec la France.
Ces organisations s’adressent d’abord aux chefs d’Etat du G5 Sahel (Burkina Faso, Mali, Mauritanie, Niger et Tchad). Elles les exhortent à ne pas se rendre à Pau le 16 Décembre et leur recommandent de se concerter dans les meilleurs délais en vue de préparer une réponse commune à l’interpellation du président de la République française.
Elles demandent aussi aux chefs d’État de la CEDEAO, d’organiser dans les plus brefs délais, l’organisation d’un sommet des chefs d’Etat afin de dégager des mesures effectives permettant la restauration de la paix dans le Sahel et la relève des troupes françaises.
La déclaration sortie par ces organisations appelle également les chefs des Etats membres de l’Union Africaine qui doivent saisir la gravité de l’heure et s’engager résolument aux côtés des Etats du G5 Sahel, à prendre en main la sécurité et le maintien de la paix dans la zone.
Un appel aux chefs d’État à mettre en place, avec les experts africains, universitaires, militaires, organisations de la société civile, etc., une stratégie de sortie de la France du dispositif sécuritaire dans le Sahel et sur les implications de cette sortie dans d’autres secteurs, notamment la poli tique monétaire ( le franc CFA), l’exploitation des ressources naturelles, la stabilité institutionnelle, a été lancée.
Aux Nations Unies, et aux organisations internationales des droits de l’homme, nous demandons une mission spéciale d’observation au Sahel pour évaluer la présence de la France dans la zone.
Enfin, cette déclaration s’adresse aux peuples africains du G5 Sahel, de l’espace CEDEAO, de l’Afrique tout entière et de sa diaspora. Nous les appelons à se mobiliser pour exiger le retrait des troupes françaises en Afrique.
Cette interpellation irrévérencieuse d’Emmanuel Macron à l’endroit des chefs d’Etat est considérée « comme une opportunité pour tourner la page de l’impérialisme français en clarifiant définitivement les relations diplomatiques, les conditions et cadres d’intervention de la France dans les pays africains de la zone franc.