Sculpteur de son état, marié à deux épouses et père de six enfants, Cheikh Fall Sène, né le 1 janvier 1982 à Bambey, était devant la barre de la Chambre criminelle du tribunal de grande instance de Diourbel, ce vendredi 29 mars 2019. Il était poursuivi pour meurtre. Le lundi 5 janvier 2015, un agent du commissariat urbain de police de Bambey qui se trouvait dans la circulation est informé d’une bagarre opposant deux individus non identifiés à hauteur du centre de réinsertion sociale de la commune de Bambey. Lorsque les enquêteurs se sont rendus sur les lieux, ils ont trouvé le nommé Cherif Ka très grièvement blessé à l’arme blanche.
Ce dernier a été aussitôt évacué à l’hôpital régional Heinrich Lübke de Diourbel. Alors que son vis-à-vis, Cheikh Fall Sène, avait déjà pris la fuite. Mais alors que les recherches intenses étaient en cours pour retrouver le suspect, Cherif Ka décède des suites de ses graves blessures. Il a rendu l’âme peu après 19 heures 30 minutes, ce jour là, mercredi 7 janvier 2015.
Terré à Dakar, chez son jeune frère, Modou Sène, à qui il raconte sa mésaventure. Ce dernier convainc son frère de se rendre à la police lorsqu’il apprit la mort de Cherif Ka. Le suspect accepte.
Le certificat de genre de mort de la victime atteste qu’elle est décédée d’un poly-traumatisme avec traumatisme cranio-encéphalique et une obnubilation et une amputation traumatique des poignets.
À la barre, l’accusé a basé son système de défense sur la légitime défense au moment d’expliquer sa version des faits. Il rembobine : « Cette nuit-là, j’ai quitté mon travail très tard. Je me suis alors rendu au ‘Bar bleu’ pour déstresser un peu. J’ai pris une bière et un verre de Jin. Quand je suis allé aux toilettes pour soulager ma vessie, j’ai croisé Cherif Ka qui m’a pissé dessus. Cela m’a bien énervé et je le lui ai fait savoir. Mais il m’a répondu sèchement. Après quoi, je suis allé boire au bar ‘Chez Oumy’. Mais quand j’ai quitté ces lieux pour rentrer chez moi, j’ai été violemment frappé au dos. Quand je me suis retourné, j’ai vu Cherif Ka armé d’un coupe-coupe, menaçant de me tuer. J’ai couru jusqu’aux rails pour sauver ma vie, mais il m’a couru après. C’est là que je l’ai frappé à la main avec ma hache pour qu’il lâche son coupe-coupe. Puis, je lui ai porté deux à trois coups pour qu’il me laisse tranquille.»
Cette version est démentie par Soulèye Ka, le père de la victime. Qui déclare avoir constaté sur le corps de son fils mort, plus de dix-huit blessures faites par arme blanche.
La partie civile a réclamé huit millions de dommages et intérêts. Pour sa part, le procureur a estimé que Cheikh Fall Sène a voulu travestir les faits. Pour lui, l’accusé n’a pu être surpris par derrière par la victime. Le maître des poursuites a indiqué que Cheikh Fall Sène s’était acharné sur Cherif Ka et qu’il avait bel et bien l’intention de donner la mort en lui infligeant dix-huit coups à l’arme blanche. Il a déclaré que l’état d’ébriété du prévenu ne pouvait pas constituer une excuse.
Pour leur part, les avocats de la défense, Mes Assane Dioma Ndiaye et Moussa Baldé, ont remis en cause et rejeté les affirmations du procureur, avant de demander la requalification des charges de meurtre en coups et blessures volontaires ayant causé la mort sans aucune intention de la donner. À titre principal, ils ont plaidé l’acquittement de Cheikh Fall Sène, avant de solliciter l’excuse de provocation conformément aux dispositions de l’article 309 du code pénal.
Rendant son délibéré, la Chambre a suivi le réquisitoire du procureur en condamnant Cheikh Fall Sène à 20 ans de travaux forcés. À la famille du défunt, l’accusé a été condamné à payer 8 millions de dommages et intérêts.