Ibou Ndour : «On n’a jamais pensé que Pape Diouf nous quitterait un jour»

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Avec sa frangine Ngoné Ndour, il cogère le label de production «Prince Arts» qui manageait l’artiste Pape Diouf. Après le départ inattendu de ce dernier de cette structure, il revient sur les circonstances de leur «divorce» qui a fait couler beaucoup d’encre…

Votre rupture avec l’artiste Pape Diouf est sur toutes les lèvres. Pouvez-vous y revenir ?

Il n’y a pas grand-chose à redire. Pape Diouf s’est présenté dans les locaux du label jeudi dernier. Il était là pour nous signifier son désir de voler de ses propres ailes. Autrement dit, il ne sentait plus le besoin de travailler avec nous. De ce fait, nous lui avons accordé ce droit. Il a pris sa décision, nous ne pouvons que l’accepter. Nous nous sommes donc quittés en de bons termes.

Y a-t-il eu des précédents entre vous, des contentieux qui auraient pu pousser l’artiste à vous tourner le dos ?

Comme dans toutes collaborations, les différends ne peuvent pas manquer. Mais, il n’y a rien eu d’insurmontable. A chaque fois qu’il y a eu des soucis, nous en avons parlé et fait table rase. Ce qu’il faut retenir, c’est qu’entre Pape Diouf et «Prince Arts», il n’y a aucun nuage, aucune brouille. Il a pris, de son propre chef, la décision de quitter la boîte. Il nous a clairement dit qu’il était majeur et, vu le niveau de sa carrière, il peut se frayer son propre chemin. Il est prêt à se prendre en charge.
Cette décision vous a-t-elle pris au dépourvu ou vous la sentiez venir ?

Non, honnêtement on ne s’y attendait pas. On n’a jamais pensé que Pape Diouf quitterait un jour le Label «Prince Art». Ce sont des rumeurs qui circulaient depuis des années. A plusieurs reprises, le débat a été agité dans les médias, sans plus. Aujourd’hui c’est fait, le divorce est consommé. Nous n’allons pas retenir un artiste qui aspire à faire ses preuves seul. On ne peut que lui souhaiter bon vent.

Comment se fait-il que ce soit aussi facile pour un artiste de quitter le label. N’y avait-il pas des aspects juridiques à vider d’abord ? N’étiez-vous pas lié par un contrat ?

Entre Pape Diouf et «Prince Arts», nous avons une sorte de contrat de management. C’est le cas pour tous les autres artistes avec qui nous travaillons. Si aujourd’hui, un artiste estime qu’il veut quitter «Prince Art», il peut partir en paix. On a construit la carrière de tellement d’artistes et qui, du jour au lendemain, nous ont quittés. Nous ne les avons jamais poursuivis en justice. Nous faisons, avant tout, du social. Les albums ne se vendent plus. Vendre 2 000 Cd pour un chanteur relève maintenant d’un exploit. Même pour les plus grands. Pour revenir à Pape Diouf, je peux vous jurer qu’on n’a pas signé de contrat avec lui. Pape Diouf ne peut pas vous sortir un contrat signé avec «Prince Art». Pour autant, il y a une entente entre nous. «Prince Art» se charge de manager Pape Diouf et de distribuer sa musique, moyennant un pourcentage sur les bénéfices générés lors des spectacles qu’on se charge de monter ou de démarcher. Il est connu que seules les prestations en live font entrer de l’argent. Pape Diouf fait indirectement partie de la famille Ndour. S’il a envie d’aller voir ailleurs, il peut y aller, sans soucis. On n’a pas de contrat avec Pape Diouf, car on est en famille. Notre contrat de production avec Pape Diouf remonte à la naissance de «Prince Art». Mais vu qu’il n’y avait pas l’effet escompté, on ne l’a pas encore renouvelé. Aujourd’hui, si Universal Music s’intéresse à lui et peut lui ouvrir d’autres portes, on ne peut qu’apprécier, car ça ne change rien dans nos relations avec Pape Diouf.

Au début, vous aviez bien un contrat de production ?

Avec Pape Diouf, au début, il y avait un contrat de production. Mais quand la musique sénégalaise a commencé à avoir des problèmes et que les Cd ne se vendaient plus. On ne l’a pas renouvelé. Ça fait presque 8 ans maintenant. Nous avons décidé de signer avec nos artistes des contrats de management pour que le Label puisse survivre. Le Label finance l’album, les spectacles, les clips, la publicité et après, il a un pourcentage de management. Nous l’avons fait en premier avec Titi et par la suite, Pape Diouf est venu. C’est lui-même qui a demandé son application. Et par la suite, Ngoné Ndour m’a convaincu de manager tous les artistes du Label. J’ai accepté de le faire. Il n’y a jamais eu de problème. On l’a emmené en tournée un peu partout dans le monde et il s’est produit dans de grandes scènes.

N’empêche qu’il y a des rumeurs qui disent que «Prince Arts» gruge ses artistes et c’est la principale raison qui a poussé Pape à partir ?

Nous ne grugeons pas les artistes. Beaucoup de gens parlent de la musique sénégalaise sans aucune maîtrise. Economiquement, ils n’ont aucune idée des sacrifices consentis. Maintenant, les gens ne sortent plus pour aller en boîte, comme avant. Avec l’avènement des réseaux sociaux, on n’a plus besoin de sortir pour voir un artiste. Ils sont en live sur Facebook, Snapchat et autres. La musique n’a pas d’économie. C’est juste du buzz qui est là. Pour faire un bon clip, il faut au minimum deux millions et parfois plus. La confection d’un album tourne autour de 12 à 13 millions de FCfa. Que dire des spectacles au Grand Théâtre où la location est à 5 millions, sans compter les frais payés à la Perception, à la Sodav et autres, les cachets des orchestres. Tout cela, nous le prenons en charge et à l’arrivée, on se retrouve avec des bénéfices qui peuvent à peine couvrir toutes les charges.

Ne peut-on pas dire que c’est le contrat avec «Universal» qui a influé le choix de Pape Diouf ?

Ce qui est constant, c’est que nous avons donné à Pape Diouf notre aval pour signer avec cette maison de production, mais jusqu’au moment où il mettait fin à notre collaboration, il ne m’a montré le contrat. Il a sorti un single… Je l’ai vu à Paris à «Universal» où on lui souhaitait la bienvenue. Donc, c’est là que je me suis dit, peut-être, que le gars est prêt à partir. C’est son choix. Il a mené une grande partie de sa carrière dans «Prince Art». Nous ne pouvons pas participer à l’évolution d’un artiste jusqu’au sommet pour ensuite, le faire tomber.

MOMAR GILBERT BADJI

 

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