Le Sénégal a décroché sa seule médaille aux Jeux olympiques en 1988 grâce au hurdler El Hadj Amadou Dia Ba. Le vice-champion olympique à Séoul en Corée, est revenu, dans un entretien avec Sport News Africa visité par Senego, sur les 4 années de préparation à partir des Jeux de Los Angeles, qui ont permis une telle performance. 33 ans après, sa notoriété au pays reste intacte, tout comme sa médaille d’argent, soigneusement conservée chez lui. Pour les chaussures, c’est une autre histoire.
El Hadj Amadou Dia Ba, vous avez gagné votre médaille d’argent aux Jeux olympiques de Séoul en 1988. Comment avez-vous préparé votre performance ?
En 1984, j’étais déjà en finale des JO de Los Angeles. J’avais pris la 5ème place. Il fallait que je m’améliore, je me bonifie. Et surtout arriver à me décomplexer des Américains qui dominaient la discipline. Je suis donc allé aux Etats-Unis me préparer durant tout l’hiver. J’habitais à l’époque en France. J’ai passé tout l’hiver là-bas, j’ai fait des compétitions. Pendant les 4 années précédant les Jeux avec un ami et frère, Innocent Igbunike qui était le meilleur coureur de 400m d’Afrique. Il y avait aussi feu Gabriel Tiacoh (sprinter ivoirien décédé en 1992) qui, lui, était vice-champion olympique en 1984. Cela m’a permis de bien m’entraîner et ça s’est bien passé.
Je rentrais en Europe pour faire les compétitions. J’étais très bien préparé et entre temps j’ai gagné des titres de champion d’Afrique. En Europe, j’étais un des meilleurs avec Harald Schmid. C’est ainsi que je me suis préparé d’arrache-pied pour faire les derniers réglages. J’avais commis beaucoup d’erreurs en 1984. J’ai mûri et cela m’a énormément aidé. Ces 4 ans m’ont permis d’être prêt pour décrocher cette 2ème place en 1988 et donc la médaille d’argent.
Racontez-nous cette journée, votre état d’esprit au réveil, le stress et l’excitation et la joie que vous avez ressenti…
On avait déjà effectué les séries et j’avais réussi la mienne. J’avais terminé 2ème de ma 1/2 finale derrière Philips (André). Pour moi, c’était bien parce que j’étais en contrôle durant ma course. Tous les gens qui étaient en finale, on se rencontrait souvent lors des meetings sauf Edwin (Moses) qu’on croisait de temps en temps. Mais on se connaissait et on savait de quoi chacun était capable. La 1/2 finale se passe bien et donc j’ai un couloir favorable en finale, le couloir 5 à l’extérieur. C’était pour moi une motivation. Ça m’a permis de très bien dormir et quand je me suis réveillé le lendemain, c’était comme lors de toutes les autres compétitions mais un peu plus cette fois-ci.
C’était comme le jour du résultat des examens. Tu étudies durant des années pour ne pas se rater. Il y avait un peu d’excitation et un peu de stress parce que tout le peuple sénégalais attendait quelque chose de moi. Tout cela sur mes épaules, il me fallait bien gérer ce stress. Même si on était un peu habitué, l’adrénaline montait quand même crescendo. Le matin au réveil, avec mes amis sénégalais et le coach, on est allé prendre le petit-déjeuner tranquillement et ensuite nous sommes allés au stade.
Quelle a été votre première pensée après avoir décroché cette médaille ?
On pense tout de suite au coach, en général. C’est avec lui que tu as construit tout cela pendant des années. Après le coach, tout de suite derrière, on pense à la famille. J’ai aussi pensé au peuple sénégalais. En général on pense à l’entourage, les collègues d’entraînement et tout cela qui m’ont soutenu dans cette quête de médaille. Là, ça défile automatiquement.
Quelles ont été les retombées financières et sur le plan de la notoriété de votre médaille?
Sur le plan de la notoriété, c’est une bonne chose. La preuve, vous êtes en train de m’interviewer 33 après ces Jeux de Séoul. Avoir bien représenté le pays a fait qu’au Sénégal les gens te reconnaissent dans la rue. Les jeunes se réfèrent à toi. C’est sur le plan de la notoriété qu’on gagne beaucoup plus. Cela m’a permis de pouvoir conseiller les jeunes athlètes sur comment se préparer à de telles compétitions et parvenir à décrocher une médaille olympique. Financièrement, je peux dire que c’est aléatoire parce que ça m’a permis d’avoir un contrat avec un équipementier et de pouvoir faire les grands meetings internationaux. Mais la notoriété est beaucoup plus importante.
El Hadj Amadou Dia Ba, qu’est devenue la médaille ?
La médaille? À la maison, rangée quelque part. Il m’arrive très rarement de la ressortir. La dernière fois où je l’ai ressorti, c’était il y 4 ou 5 ans. C’était pour le montrer à des athlètes sénégalais. Pour que ça les motive un tout petit peu. Elle se trouve dans un coin, soigneusement gardée chez moi.
Que sont devenus le dossard, le maillot et les pointes de cette course?
Le dossard, le t-shirt et le maillot sont encore avec moi. Je les ai encadrés et gardés avec moi. Malheureusement les pointes et le survêtement de la finale ont été volés dans ma voiture. Je m’étais fait voler ma voiture et tout était dedans. Par contre le maillot et le dossard étaient avec moi bien encadrés.
À quelle place vous mettez ce souvenir parmi les meilleurs de votre vie ?
Si on parle d’El Hadji Amadou Dia Ba, c’est parce qu’il y a eu cette médaille d’argent des Jeux de Séoul. Il y a beaucoup de gens qui ont pratiqué un sport et que s’ils ne gagnent pas de titres, ils sont malheureusement rangés aux oubliettes. Donc ça fait partie de ma vie cette médaille. Au début c’était de la pression mais maintenant cela fait partie de moi, cela fait partie de ce patrimoine.
Infosrewmi avec Sport News Africa