Deux journalistes ont été arrêtés et incarcérés lundi 10 décembre 2018 après avoir mis en ligne une image jugée offensante par la communauté chrétienne de Jordanie. Dans ce petit pays arabe, la liberté d’expression est mise à l’épreuve.
Les deux journalistes sont accusés d’avoir enfreint la loi sur la cybercriminalité, et risquent plusieurs années de prison. Ils ont mis en ligne un montage photo jugé blasphématoire, représentant Jésus entouré de ses apôtres lors de son dernier repas. L’image fait apparaître un chef de cuisine célèbre, de nationalité turque, en train de saler le repas de Jésus par-dessus son épaule. La petite communauté chrétienne de Jordanie s’est sentie insultée. Pour autant, pas de quoi justifier une incarcération selon Leen Halawani, une collègue de ces deux journalistes, qui a manifesté contre leur détention : « Ce genre de choses circule très vite sur les réseaux sociaux. Je crois que c’est juste une erreur, et pourtant, la sanction est très sévère. », estime-t-elle.
Encore plus de sévérité
Le gouvernement jordanien songe à réviser la loi sur la cybercriminalité qui a mené ces deux journalistes en prison, mais pour la rendre encore plus sévère. Des amendements sont en discussion et ils prévoient une peine maximale de deux ans de prison pour ceux qui propageraient des fausses nouvelles et des messages de haine sur internet. Pour les associations de défense de droit de l’Homme, la définition des messages de haine est bien trop vague dans cette loi. Elles s’inquiètent du fait que le gouvernement puisse ainsi poursuivre tous ceux qui critiqueraient son action. Amnesty International parle d’un effet « dévastateur ».
Le gouvernement jordanien cherche, au moyen de cette loi, à contrôler les réseaux sociaux, car c’est là que s’organise la contestation sociale… Effectivement, la colère sociale gronde en Jordanie. Des manifestants se rassemblent toutes les semaines aux abords du bureau du Premier ministre. Ils protestent contre la politique fiscale des autorités. Ils organisent leurs mouvements sur Facebook. Cela explique également pourquoi le gouvernement cherche à restreindre la liberté d’expression sur ces réseaux sociaux.
Comment cette loi en préparation est-elle perçue par les journalistes jordaniens ?
Beaucoup critiquent le fait que la diffusion de fausses nouvelles et de messages de haine soit criminalisée, mais beaucoup disent aussi qu’il y a trop d’insultes et de rumeurs sur ces réseaux sociaux. Certains estiment que la répression est la solution. Hier, lors de la manifestation de soutien aux deux journalistes incarcérés, quelques journalistes ont expliqué qu’ils ne s’opposaient pas à des peines de prison pour ceux qui inciteraient à la haine sur internet.