La firme pharmaceutique tunisienne Médis ferme ses portes au Sénégal envoie 340 employés au chômage

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Le feu couve à Médis. En effet, entre la direction de l’entreprise et les travailleurs, le courant ne passe plus. A l’origine du conflit, la notification mercredi dernier par la direction de l’usine, d’une procédure de mise en chômage technique de plus de 340 travail- leurs pour une durée indéfinie. Une notification qui a fait sortir les employés de leurs gonds. Le témoin a enquêté…

En avril 2017, la firme pharmaceutique tunisienne Médis avait racheté le laboratoire Sanofi. Objectif : se développer en Afrique subsaharienne pour une accessibilité géographique et financière du médicament à partir de sa nouvelle base sénégalaise. Mieux, la nouvelle société avait promis de s’investir dans la fabrication de médicaments bio-similaires pour la prise en charge de maladies chroniques comme le cancer, le diabète, l’hypertension artérielle etc. C’était une bonne nouvelle pour le Sénégal, jusque-là confronté au double fardeau des maladies épidémiologiques et des maladies chroniques à soins coûteux.

Lors d’une cérémonie tenue le 5 avril 2017 dans ses locaux et présidée par le ministre de la Santé de l’époque, Pr Awa Marie Coll Seck, le Directeur exécutif de médis, Lasaad Boujbel, avait expliqué le choix de Dakar par le «potentiel important» de la société, mais aussi par la qualité du capital humain de notre pays. Le repreneur s’était aussi engagé à faire de ce site de production un fleuron de l’industrie pharmaceutique au Sénégal. Une industrie qui, selon lui, allait offrir aux professionnels de santé une gamme de médicaments contribuant directement à l’amélioration de la qualité des soins. Il avait aussi promis, à court terme, un investissement pour élargir la gamme des médicaments à fabriquer localement et ceux déjà enregistrés et commercialisés en Tunisie.
A moyen terme, l’entreprise comptait également développer les médicaments spécifiques essentiels et qui pèsent lourd au niveau des dépenses de santé nationales. A long terme, Médis promettait des extensions pour répondre aux besoins du marché de la zone pour les produits de première intention dans les hôpitaux et les institutions sanitaires tels que les solutés massifs et les médicaments injectables à usage professionnel (anesthésiques généraux et autres).

Deux ans après le lancement en grande pompe, l’entreprise décide de fermer ses portes…
Deux ans plus tard, ce rêve s’est brisé. La firme industrielle tunisienne a décidé de fermer ses portes. elle l’a fait savoir le mercredi 15 janvier 2020 à son personnel, à travers une note d’information signée par le directeur du site, M. Aziz Cissé. Pour savoir les véritables raisons de cette fermeture, le journal Le Témoin a pris langue avec certains délégués du personnel qui ont confirmé cette information avant de confier que les responsables de la boîte les ont rencontrés, il y a de cela quelques jours, pour leur faire part de leur décision de fermer la boîte et les envoyer en chômage technique.

Le motif serait, selon nos interlocuteurs, dû au fait que Médis a connu des pertes financières estimées à plus de 2 milliards de francs. et cette mauvaise santé financière serait, selon notre interlocuteur, confirmée par le cabinet d’audit Mazars de Cheikh Omar Seck, époux de Sokhna Seck, une des responsables influentes de l’entreprise. « Mais, quand on nous a fait part de cette décision, nous, délégués, ne sommes pas restés les bras croisés. nous avons mené nos propres investigations et avons découvert qu’il y aurait eu des détournements de la part du directeur du site Aziz Cissé, du responsable financier et comptable Lamine Boye et du responsable des ressources humaines Claude Dalmeida », selon nos sources.
Les délégués confient avoir, dès les heures qui ont suivi cette rencontre, adressé des correspondance à la présidence de la république, au ministère de la Santé et l’action sociale et à la Direction de la pharmacie et du médicament (Dpm), aux actionnaires aussi entre autres.

Près de 320 travailleurs en chômage technique
Dans leurs lettres, les travailleurs ont décrié les malversations et la mauvaise gestion au sein de leur entreprise. « Le directeur de la Dpm, nous a reçus le mardi dernier et s’est insurgé contre la décision de nos employeurs tout en nous faisant savoir que l’entreprise pharmaceutique tunisienne n’a pas le droit d’arrêter sa production sans aviser les autorités concernées », rapportent nos sources. Qui confient aussi avoir rencontré le mercredi 15 janvier dernier l’inspecteur du travail qui, à les en croire, les a rassurés que le Sénégal est un pays de droit et que si Médis devait envoyer ses employés en chômage technique, elle doit respecter la procédure à cet effet.
« Arrogant qu’il est, le directeur exécutif est venu de Tunisie pour nous rencontrer. Selon lui, il n’avait rien à nous dire à part ceci : ’’je n’ai pas beaucoup de choses à vous dire. Juste vous informer que je vais vous envoyer en chômage technique.’’ Pire, ils ont fait sortir tout le personnel de l’usine », révèlent les interlocuteurs du journal qui qui soulignent que l’entreprise Médis Sénégal compte 120 employés permanents, 200 journaliers et des stagiaires.

Le système sanitaire nationale menacé…
Seule industrie pharmaceutique de manufacturing du Sénégal dans la mesure où elle fabrique des pro- duits, fait des mélanges de comprimés avant de les mettre sur le marché, l’arrêt de la production de médis va impacter sans doute le système sanitaire du pays. « Avec cette décision de Médis d’arrêter sa production et d’envoyer tout son personnel en chômage technique, je peux jurer que le président de la République va échouer avec sa Couverture de maladie universelle. Cela est indéniable dans la mesure où même quand Médis était là, l’Etat était obligé de sortir annuellement plus de 130 milliards de francs pour importer des médicaments. Et cela risque d’être pire avec la fermeture de cette entreprise », avertissent les interlocuteurs du Le Témoin.

Le personnel convoqué aujourd’hui au ministère de la Santé…
Muet depuis le début de cette crise à Médis, le ministre de la Santé et de l’Action sociale, Abdoulaye Diouf Sarr a, sauf changement de dernière minute, convoqué ce vendredi les représentants du personnel pour échanger sans doute avec eux sur la crise qui sévit actuellement dans leur entreprise occasionnant leur chômage technique. Après le ministère de la Santé et de l’Action sociale, les dé- légués du personnel seront, informent les sources de nos confrères, mercredi prochain à l’Inspection générale du travail. M.

Aziz Cissé, directeur du site : « Chaque jour que Dieu fait, on accuse des gens… »
Joint au téléphone par Le Témoin, le directeur du site, M. Aziz Cissé, pense que dans des cas comme ça, c’est la Direction générale qui s’organise et choisit ceux qui devront parler en son nom. De ce fait, notre interlocuteur dit ne pas être en mesure de répondre à nos questions. Toutefois, il s’est exprimé après avoir été interpellé sur les malversations dans lesquelles il a été cité. « Je ne pourrais vraiment pas vous répondre. Nous sommes dans une entité organisée. C’est donc à l’entité de répondre à vos questions. Toutefois, vous savez bien que ce n’est pas la première fois qu’on accuse des gens sans fondement. Ce n’est pas parce qu’on vous accuse que c’est vrai », réplique M. Cissé qui  a invité le journal à se rapprocher des plus hauts responsables de Médis qui se trouveraient actuellement en Tunisie.

Le Témoin

 

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