Le COVID 19 doit réconcilier les élites autour de l’essentiel : la souveraineté Par Dr Cheikh Guèye Secrétaire Permanent du Rapport Alternatif sur l’Afrique (RASA)

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Il n’y a rien de pire dans un pays en difficulté face à une telle épreuve que de voir les forces vives de la nation se diviser. Pour ma part, je considère sans provocation que les mesures prises par le Président de la République devaient l’être depuis 15 jours. En prenant les mesures contraignantes que nous avons vécues depuis deux mois, on ne connaissait rien de l’épidémie du coronavirus à part qu’elle ferait des milliers de morts comme en France (dont nous regardons sans doute trop les chaines de TV), en Italie et en Chine. Aujourd’hui, notre système sanitaire s’est transformé en prévision de cette catastrophe annoncée. Celle ci n’a pas lieu et n’aura pas lieu comme tous les experts l’ont déjà affirmé. Pendant ce temps, le tissu économique s’écroule et les sénégalais non salariés qui représentent la très grande majorité s’appauvrissent alors qu’ils étaient les mamelles de la redistribution et de la solidarité. Il était temps de changer de cap. Le Président de la République a surtout écouté les experts sanitaires depuis deux mois. Ils ont soigné et donné des orientations efficaces dans la gestion épidémiologique malgré quelques limites. Les cas sont encore limités et les morts également. Mais à côté de ces cas, combien d’autres morts pour les raisons différentes de l’épidémie ? Combien d’élèves ont perdu leurs acquis depuis deux mois ? Combien de commerçants ont eu des problèmes d’approvisionnement et perdu leurs clientèles et leurs marges ? Combien de transporteurs sont en perte sèche ? Combien d’agriculteurs sont en retard dans leur calendrier cultural ? Combien de producteurs ont perdu leurs productions pourries par l’attente ? Le débat actuel sur l’assouplissement des contraintes pesant sur l’économie informelle et rurale et l’ouverture des mosquées révèle encore une fois ce que j’analyse avec d’autres depuis de nombreuses années : la confrontation sourde et structurelle entre deux catégories de sénégalais opposées sur plusieurs enjeux depuis des années. Pendant que les uns se réjouissent de la libération de franges importantes de notre moteur économique et doutent de la gravité supérieure de l’épidémie par rapport à leurs préoccupations, une « caste » d’extrémistes parlent de « capitulation » et de « recul » promettant une aggravation de l’épidémie et prennent même le chemin des prévisions pessimistes et racistes entendues ailleurs. Le Sénégal est en faillite économique. Nos acquis en terme d' »enrichissement » sont perdus. Le Plan de Résilience mis en place est déjà un échec et n’empêchera pas les faillites d’entreprises, le chômage partiel et les pertes de ressources fiscale. Il était plus que temps de donner une nouvelle perspective pour les sénégalais.
Ne pas rater le prochain virage : Plus qu’un virage, c’est même un basculement dans la souveraineté des choix et des meilleurs choix qu’il faut désormais réussir. Rebatisons un modèle économique et social qui renverse les priorités de notre pays, replaçant l’économie réelle et la majorité des acteurs économiques au coeur des politiques, en termes de stratégies et de moyens. Replacons la santé, l’éducation et la formation, la solidarité pour les plus faibles, la modernisation de nos structures de production primaires pour l’autosuffisance alimentaire, l’industrialisation autour de nos besoins, la solidarité intergénérationnelle et intragénérationelle, la revivification de la famille dans son vrai rôle d’éducation et de transmission, la renégociation d’un contrat social basé sur les croyances et la cosmogonie des sénégalais dans leurs diversité, leurs cultures, leurs langues, leurs goûts. Il s’agit d’une reconquête de nous même et de notre destin. La pandémie du COVID 19 ne finira pas en quelques mois. Quand la maladie s’éloignera, ses conséquences seront prégnantes dans tous les secteurs de la vie économique et sociale et nous vivrons avec le risque du retour d’un virus infectieux aussi dangereux avec lequel nous devrons encore apprendre à vivre. En cela le COVID est également une bénédiction et une opportunité pour un nouveau départ. Notre pire ennemi sera l’OUBLI. N’oublions pas les leçons tirées de cette pandémie, de la raréfaction de l’approvisionnement, de l’importance des chercheurs et experts pour éclairer les politiques et choix, de l’importance des médicaments de chez nous (pour ne pas dire traditionnels)

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