Levée de l’immunité parlementaire d’Ousmane Sonko : Comment le bureau de l’Assemblée a violé la loi

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La décision du bureau de l’Assemblée nationale de procéder au vote de ses membres, comme précisé par le président du groupe parlementaire libéral et démocratie Cheikh Bara Doly Mbacké, et celle relative à la saisine de la commission des lois, constituent des actes contraires aux dispositions de la loi.

  1. Le bureau de l’Assemblée nationale n’a aucune prérogative pour délibérer sur la levée ou non d’une immunité parlementaire. Cet attribut est uniquement réservé à la plénière de l’Assemblée nationale. Le vote effectué ne répond à aucune disposition de la loi. Le bureau de l’Assemblée nationale n’a pas, en l’espèce, de pouvoir de délibération.

Il règle les délibérations mais ne délibère pas. En France, il a fallu une révision constitutionnelle en 1995 pour permettre au bureau de l’Assemblée nationale de délibérer à huis clos pour la levée d’une immunité parlementaire, après l’instruction faite par sa délégation spécialisée qui examine « le caractère sérieux, loyal et sincère de la demande , après avoir entendu le parlementaire concerné ».

Alors qu’avant 1995 l’Assemblée nationale délibérait, elle-même, en séance publique. Cette réforme n’a jamais été faite au Sénégal. Calquer cette manière de faire dans le contexte sénégalais, sans aucune base légale, est une faute grave de la part du bureau de l’Assemblée nationale. Le bureau n’avait aucun pouvoir délibérant dans cette affaire.

  1. La saisine de la commission des lois pour mettre en place une commission ad hoc est contraire aux dispositions du règlement intérieur de l’assemblée nationale. Une commission ne peut en aucune manière mettre en place une autre commission. Qu’elle soit permanente ou spéciale, même si c’est pour ensuite la faire entériner par la plénière de l’Assemblée nationale.

Une commission est mise en place et entérinée par l’Assemblée nationale. L’article 34 du règlement intérieur est clair : « Les membres des commissions sont désignés par l’Assemblée nationale (…). » En l’espèce, la procédure de levée de l’immunité parlementaire est prévue à l’article 52 du règlement intérieur de l’Assemblée nationale associé à l’article 34 dudit règlement.

L’article 52 dispose : « Il est constitué, pour chaque demande de levée de l’immunité parlementaire d’un député ou pour chaque demande de suspension de poursuites déjà engagées, une Commission ad hoc de onze membres nommés selon la procédure prévue à l’article 34. » Et cette procédure prévue à l’article 34 voudrait que les membres de la commission ad hoc soient désignés « par l’Assemblée nationale ».

Par conséquent et en conclusion, il importe de préciser que contrairement à la procédure utilisée par le bureau de l’Assemblée nationale, ce dernier ne peut ni approuver ni rejeter la requête formulée pour la levée d’une immunité parlementaire. Il doit juste saisir la conférence des présidents, qui est chargée d’établir l’ordre du jour des travaux de l’Assemblée et d’en fixer le calendrier (art. 19 du RIAN).

Cette dernière, pour se mettre en conformité avec les dispositions de l’article 52 du règlement intérieur de l’Assemblée nationale, devait fixer la date de mise en place d’une commission ad hoc par l’Assemblée nationale, elle-même (art. 34 RIAN) et non par une autre commission (aucune disposition du règlement intérieur ne le prévoit).

Ainsi cette commission, une fois constituée devra entendre le député intéressé, lequel peut choisir, comme défenseur, un de ses collègues. Ensuite un rapport est présenté à l’Assemblée et lors des débats « peuvent seuls prendre la parole, le Président, le Rapporteur de la Commission, le Gouvernement, le député ou son défenseur et un orateur contre » (Art 52 dernier alinéa). Le bureau de l’Assemblée nationale a manifestement violé la loi dans cette procédure de levée de l’immunité parlementaire de Ousmane Sonko.

Thierno Bocoum Président du mouvement AGIR

 

 

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