A deux semaines de la célébration du Magal de Touba, le doute plane sur le transport ferroviaire qui jouait un rôle stratégique dans le convoi des pèlerins
A deux semaines de la célébration du Magal de Touba, le doute plane sur le transport ferroviaire qui jouait un rôle stratégique dans le convoi des pèlerins. En effet, pour la première fois de l’histoire, le train risque de ne pas siffler à Touba cette année. D’ailleurs les syndicalistes sont formels sur la question et évoquent une correspondance ministérielle allant dans ce sens. Ils ont tenu un point de presse pour attirer l’attention de l’opinion sur la mort programmée du chemin de fer.
L’histoire de la cité religieuse de Touba est étroitement liée au chemin de fer. Et pour cause, c’est grâce au chemin de fer que les travaux de construction de la grande mosquée ont été réalisés, à travers l’acheminement des matériaux importés de la métropole. Après les travaux, le chemin de fer a continué à jour ce rôle stratégique, dans le transport des talibés à l’occasion du grand Magal, Mais cette année, il risque d’y avoir une rupture, car le train pourrait ne pas convoyer des pèlerins. Ce sont les syndicats cheminots qui l’ont annoncé hier, lors d’un point de presse tenu à Dakar-Bamako Ferroviaire (DBF) à Thiès.
Se voulant formels, ils évoquent une correspondance ministérielle allant dans ce sens. Selon Mambaye Tounkara, secrétaire général du Syndicat Unique des Travailleurs de Transrail (SUTRAIL), l’autorité a envoyé une correspondance pour informer qu’il n’y aura pas de train cette année au Magal. Pourtant, dit-il, les trains parvenaient bon an mal an à transporter chaque Magal environ 30.000 personnes. Il juge cette démarche irrationnelle d’autant que le chemin de fer, de son premier jour de desserte du Magal à aujourd’hui, a toujours assuré le transport avec zéro accident. De l’avis d’Abdou Khadre Dieylani Diop, chargé de la presse du syndicat des travailleurs du Petit Train de Banlieue (PTB), le président de la République doit intervenir pour faire annuler une telle décision car entre le Magal et le train.
La convergence syndicale de Dakar-Bamako Ferroviaire (DBF) qui regroupe les trois syndicats de DBF et le syndicat des travailleurs du Petit Train Bleu (PTB) ont tenu ces propos hier lors d’un point de presse au cours duquel, ils ont décidé d’unir leurs forces pour relancer le chemin de fer. Car si rien n’est, indique Mambaye Tounkara, l’activité ferroviaire risque de cesser définitivement d’ici le mois de décembre. «Ce qui est impensable avec tout ce que le chemin de fer a fait dans ce pays. Depuis 8 mois, le train ne circule pas entre Dakar et Bamako, ce qui constitue une honte pour un symbole de l’intégration sous régionale et même africaine», déclare Abdou Khadre Dieylani Diop du syndicat des travailleurs du Petit Train de Banlieue (PTB).
Pour Mambaye Tounkara, les différents syndicats ont décidé de concocter un plan d’action qui a démarré par le point de presse d’hier. Après avoir interpellé l’opinion et les autorités sur la gravité de l’heure, souligne-t-il, le plan d’action sera exécuté jusqu’à satisfaction des revendications. Le plan d’action prévoit une assemblée générale à Thiès présidée par les secrétaires généraux des centrales syndicales, puis un point de presse à Dakar.
A l’issue de cette première phase, affirme le sieur Tounkara, «il n’est pas exclu de décréter une grève illimitée. Notre combat n’a rien de politique, il s’agit juste de citoyens qui se battent pour préserver leur outil de travail et tout le monde sait que nous avons été civilisés ». Selon lui, lors de sa récente visite dans les ateliers de Thiès, le Ministre de tutelle avait affirmé que toutes les dispositions étaient prises pour que l’activité puisse reprendre effectivement au mois d’octobre. Mais se désole-t-il, à ce jour rien n’a été fait et il n’y a aucune perspective allant dans le sens de la réalisation de cette promesse.
Pis encore dit-il, un nouvel administrateur de DBF vient d’être installé à Bamako sans que les partenaires sociaux ne soient même pas informés. Et une telle démarche dit-il, laisse clairement apparaître une volonté de l’Etat d’ériger l’éternel recommencement en règle de conduite du dossier du chemin de fer. Il ajoute, « il est temps que l’Etat nous dise la vérité. En tout cas, même s’il faut bloquer le Train Express Régional (TER). Chaque train qui arrive à Bamako c’est entre 35 et 40 millions de Fcfa de recettes et nous faisions au minimum un train par jour, soit plus d’un milliard de Fcfa de recettes. Ce qui peut prendre largement en charge les frais de production. Nous ne pouvons continuer à nager dans ce flou. Ce que nous demandons, c’est d’avoir les moyens de nous prendre en charge. Si l’Etat a opté pour un nouveau chemin de fer, qu’il nous dise quel sera notre destin».
De l’avis de Mambaye Tounkara, le projet du TER est déroulé sur le patrimoine foncier du chemin de fer d’où la nécessité de décliner sa part. Il ajoute que le foncier du chemin de fer est spolié et géré par des retraités alors que celui de l’ex CNCS est entre les mains d’un liquidateur qui n’existe plus alors qu’il procure environ 60 millions de Fcfa par mois. Où est passé cet argent au moment où DBF traverse une profonde crise ? S’est-il interrogé.
Pour Abdou Khadre Dieylani Diop, la situation actuelle du chemin de fer dépasse largement les Ministres, elle doit être prise en charge par le Président de la République lui-même et à défaut le Premier Ministre. Selon lui, la racine du mal est qu’il y a des gens tapis dans l’ombre, qui manœuvrent pour saboter le chemin de fer en trompant le Président de la République, après avoir sucé aux délices de tous les pouvoirs. « L’émergence du Sénégal ne peut se faire que par la conjugaison des intelligences», a-t-il conclu.