Une semaine après l’incendie d’un de ses entrepôts à Kinshasa, la Commission électorale a annoncé jeudi le report des scrutins prévus le 23 décembre. Ces élections auront finalement lieu le 30 décembre 2019.
Était-elle vraiment prête, comme elle le prétendait ? On ne le saura sans doute jamais. Toujours est-il qu’à trois jours de la date prévue des élections présidentielle, législatives et provinciales, la Commission électorale nationale indépendante (Ceni) a indiqué, le 20 décembre, le report de ces trois scrutins au 30 décembre 2018.
Cette annonce intervient une semaine après l’incendie d’un des entrepôts de la Ceni, dans la nuit du 12 au 13 décembre, à Kinshasa. Ce jour-là, « près de 8 000 machines à voter » avaient brûlé, selon la commission électorale. Mais celle-ci avait alors immédiatement rassuré qu’elle restait déterminée à organiser les élections dans les délais, le 23 décembre, promettant de recourir à son « stock tampon » de matériel électoral.
Problème : les machines de réserve étaient déjà disséminées à travers la RDC. Un pays 80 fois plus grand que la Belgique, dépourvu d’infrastructures routières. La Ceni avait alors promis de faire revenir « le plus rapidement possible » ces ordinateurs de secours par « voie aérienne », mais elle avait également maintenu son refus de tout appui logistique de la Monusco, la mission onusienne. « C’est une question de dignité et de souveraineté », avait alors laissé entendre un haut responsable de la commission électorale.
Visiblement, cela n’a pas suffi. D’autant que des millions de bulletins de vote commandés, nécessaires pour glisser dans les machines à voter, ne sont toujours pas disponibles dans tous les 75 781 bureaux de vote à travers le pays. Des retards ont également été enregistrés concernant l’impression et le déploiement des procès-verbaux électoraux. Sans compter les défis sécuritaires dans certaines régions du pays, notamment à Beni, dans le Nord-Est où sévit également l’épidémie d’Ebola.
Appel à la démission de Corneille Nangaa
Du côté de l’opposition, certains exigent le départ du président de la commission électorale. Fidèle Babala, bras droit de Jean-Pierre Bemba et coordonnateur à Kinshasa de la campagne électorale de Martin Fayulu, rappelle ainsi à Corneille Nangaa que ce dernier a toujours prétendu que « le pays [était] engagé dans l’organisation de ces élections et ne [pouvait] se permettre un report » que les politiques, selon les propos du président de la Ceni cités par Babala, « [semblaient] ne pas mesurer les conséquences sur la stabilité et la légitimité [des] institutions » de la RDC.
« La dignité voudrait qu’il [Corneille Nangaa] démissionnât de son propre chef », estime Fidèle Babala. Avant d’ajouter : « Je ne suis pas certain qu’il a cette hauteur », pointant la « baudruche » du président de la Ceni, « remplie d’une arrogance souverainiste qui vient d’atteindre, selon lui, son niveau d’incompétence ».
Le mouvement Lucha a quant à lui indiqué mercredi que l’éventualité d’un nouveau report des élections – ces scrutins étaient initialement prévus fin 2016 – était une « une insulte de trop à la patiente » des Congolais. Le mouvement citoyen appelle désormais les responsables de la Ceni à s’assumer et à « dégager » pour laisser la place à ceux qui seront capables d’organiser des scrutins apaisés et crédibles.
Jeune Afrique