Rapport annuel d’Amnesty International sur les émeutes de mars 2021: les forces de l’ordre sont les coupables

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Comme chaque année, Amnesty International a fait le point sur la situation des droits de l’homme au Sénégal. Dans son rapport 2021-2022, rendu public ce mardi, le mouvement a dressé un tableau sombre pour le Sénégal, avec des arrestations « arbitraires » et des manifestants tués au cours de l’année

La situation des droits de l’homme au Sénégal, au cours de l’année 2021, a été passée au peigne fin par Amnesty international qui a présenté son rapport mondial 2021-2022, hier. Seulement, c’est un tableau assez sombre qui a été dressé par l’organisation qui revient sur les événements de mars dernier qui ont débouché sur la mort de 14 personnes dont trois enfants, mais encore sur les nombreuses arrestations « arbitraires » de plusieurs personnalités.

« Détentions arbitraires »

Selon Amnesty international, les autorités sénégalaises ont arrêté de façon « arbitraire » des personnalités de l’opposition et de la société civile dont Birame Soulèye Diop, Abass Fall et 17 militantes du parti Pastef, après leurs déclarations à l’endroit du gouvernement dans l’affaire Adji Sarr-Ousmane Sonko. Il y a aussi celle d’Ousmane Sonko, dans le cadre de cette affaire politico-judiciaire.

En outre, le rapport épingle le Sénégal sur l’arrestation, en janvier, de Boubacar Sèye, président de l’Ong Horizons sans frontières, à son arrivée à l’aéroport de Dakar. Il a été inculpé et placé sous mandat de dépôt pour « diffusion de fausses nouvelles » en raison d’une interview qu’il avait donnée en octobre 2020, dans laquelle il avait dénoncé le manque de transparence concernant l’utilisation par le gouvernement de fonds fournis par l’Ue pour des programmes en faveur de l’emploi des jeunes et de la lutte contre la migration irrégulière vers l’Europe. Il a été libéré à titre provisoire 20 jours après son arrestation.
Recours excessif à la force

Le rapport qui revient sur les événements de mars 2021 et les morts qui s’en sont suivis, note que les forces de l’ordre ont tiré des balles réelles pour disperser des manifestations nationales à Dakar, Bignona, Kaolack et Diaobé. Des manifestations qui faisaient suite à l’arrestation et l’incarcération de l’opposant Ousmane Sonko et avaient, dans certains cas, dégénéré en violences. Au moins 400 personnes ont été blessées, soutient le rapport. Les individus armés qui « ont prêté main-forte à la police et attaqué des protestataires dans plusieurs quartiers de la ville » rapporte l’organisation.

Face à ces agissements, rappellent Seydi Gassama et ses camarades, les autorités sénégalaises avaient annoncé l’ouverture d’une enquête sur ces violences commises lors des manifestations. Une annonce corroborée par le chef de l’Etat Macky Sall en décembre qui affirmait qu’une information judiciaire était en cours. Mais pour Amnesty International, aucune avancée concrète n’a été faite jusqu’à présent dans ce dossier. « A ce jour, et selon les avocats constitués, aucun acte d’instruction n’a été posé pour les cas de décès et de blessures graves ayant fait l’objet de plainte à Dakar, Sédhiou et Kolda notamment », déplore-t-on.

Liberté d’expression et de réunion

En mars, deux chaînes de télévision ont également été suspendues, selon le rapport de Amnesty International, en l’occurrence Walf Tv et Sen Tv pendant 72 heures. Ce, au motif qu’elles avaient diffusé en direct des images de manifestations. Le Conseil national de régulation de l’audiovisuel (Cnra) a considéré qu’en agissant de la sorte, elles s’étaient livrées à une « apologie de la violence » et à une « couverture irresponsable de la situation ». Des protestataires ont par ailleurs vandalisé des biens appartenant à l’organe de presse Groupe futurs média et au quotidien Le Soleil, considérés comme favorables au gouvernement. En juin, indique toujours le rapport, l’Assemblée nationale a adopté des modifications des dispositions du Code pénal et du Code de procédure pénale relatives au terrorisme qui ont gravement restreint les droits à la liberté d’expression et de réunion pacifique. Des expulsions forcées ont encore eu lieu cette année, toujours selon la note de Amnesty International.

Droits des détenus et des enfants

La surpopulation dans les prisons a également été mentionnée dans le rapport qui indique que cette situation mettait gravement en danger la santé des personnes détenues. Le système mis en place par les autorités carcérales pour surveiller les cas de Covid-19 a conduit à une telle surpopulation dans la prison du Cap Manuel, à Dakar, que les personnes détenues ne pouvaient même plus s’allonger. Le rapport qui se penche également sur le droit des enfants, indique que le Sénégal n’a pas respecté son obligation de protéger les enfants contre les mauvais traitements. Des centaines de milliers d’élèves d’écoles coraniques ont continué d’être contraints à mendier pour assurer leur subsistance, malgré l’existence d’une loi adoptée en 2005 pour lutter contre la mendicité forcée et la traite des enfants.

Seydi Gassama sur la criminalisation de l’homosexualité

Sur la grande manifestation organisée à Dakar par le mouvement And samm jikko yi et ses alliés, pour réclamer la criminalisation de l’homosexualité dans le Code pénal sénégalais, Seydi Gassama a donné la position de Amnesty International. L’organisation de défense des droits de l’homme a, en effet, clairement indiqué qu’il n’approuve pas cette requête : « Amnesty International s’oppose à cette initiative, totalement injustifiée, les actes contre-nature étant déjà très sévèrement punis par le code pénal sénégalais, article 319 du code pénal. »

Lors de cette conférence de presse, qui a suivi la publication du rapport 2021-2022, le directeur exécutif de la section d’Amnesty International Sénégal a évoqué la situation des personnes Lgbti en signalant des cas d’agression. « Des personnes Lgbti, ou présumés Lgbti, ont été attaquées physiquement et publiquement à Dakar et à Ziguinchor au cours de l’année, et un grand nombre de ces attaques ont été filmées par les agresseurs », regrette-t-il.

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