Des recruteurs d’un genre particulier. Il y a quatre jours, l’information selon laquelle une équipe de missionnaires pakistanais séjourne depuis 7 mois à Dakar dans le but de trouver des croyants sénégalais pour les mener vers le chemin du paradis défraie la chronique. Pour y voir plus clair, Emedia.sn s’est rendu dans la zone, à la trace des recruteurs de candidats au paradis.
Etablis dans la banlieue dakaroise plus précisément au quartier Alassane Samba Dia de Yeumbeul ils sont à la recherche de candidats qui veulent connaître, en 3 jours, la « voie du salut ».’’Makatal Moukarama’’ sonne l’alerte. Dans ce coin niché au populeux quartier de Fass Mbao, au coeur de la banlieue dakaroise, il existe une présence qui réveille des soupçons et fait débat : c’est celle de religieux pakistanais.
Ces enturbannés qui viennent périodiquement à ’’Makatal Moukarama’’ et dans les quartiers environnants ont fini par semer le doute dans la tête de certains notables. Depuis des années, ils fréquentent périodiquement les douze (12) quartiers de Fass Mbao. Pendant leur séjour, ils logent dans les mosquées et se prennent en charge durant tout le temps qu’ils restent dans la zone. Ce qui a fini par réveiller le doute chez certains notables, c’est que ces étrangers, même s’ils ne dirigent pas les prières, se procurent toujours du temps pour faire des prêches dans les lieux de culte.
Ils ne manquent pas non plus l’occasion de faire des visites inopportunes dans les maisons pour faire tenir des prêches auprès des populations. Avec le contexte actuel, lié à la montée de l’extrémisme, l’attitude de ces ’’Pakistanais’’, intrigue et fait jaser à Fass Mbao. « Ils n’ont pas amené quelques choses de nouveau. Ils tiennent les mêmes discours que nos imams. Je ne vois pas aussi une rébellion ou une défiance dans leurs prêches. Toutefois, je me pose toujours la question de savoir ce qu’ils veulent réellement. Franchement, je ne comprends pas leur démarche », a laissé entendre Talla Bane.
Habitant de Makatal Moukarama, Talla, la soixantaine, dont sa maison fait face à la mosquée du quartier témoigne de la présence réelle de religieux pakistanais dans le quartier. « Ils sont partis récemment. Leur présence dans le quartier date depuis des années. Depuis la fête de tabaski, ils sont venus ici, au moins, à trois reprises », renseigne M. Bane. Pour avoir vécu une vingtaine d’années en Europe et par conséquent s’imprégner des questions d’actualité notamment celles qui sont liées au terrorisme, Talla Bane reste pessimiste vis-à-vis de ces étrangers et observe dans les moindres détails leurs faits et gestes. « Je vois même que dans leur façon de prier, ils sont une peu différent de nous. Alors que, je pense qu’en matière de religion, nous n’avons rien à apprendre des étrangers », a estimé M. Bane.
Fichés par la Dic
Interpellé sur cette présence d’étrangers dans son quartier, le Délégué de Makatal Moukarama, Alassane Moussa Dia, dit l’avoir constaté comme tout le monde. D’ailleurs, il n’était même au courant de leur dernier séjour dans son fief. « Cette fois, ils ne sont pas venus chez moi. Lors de leur dernière visite, ici, je leur avais clairement dit : ceux qui viennent chez moi, il faudrait que je sache qui ils sont, ce qu’ils veulent réellement… C’est peut-être à cause de cela qu’ils ne sont pas venus me rendre visite », nous confie le délégué de quartier de Makatal Moukarama.
Toutefois, Alassane Moussa Dia reconnaît que la présence de ces étrangers dans le quartier et dans les zones environnantes date, au moins, d’une décennie. D’après lui, ces ’’Pakistanais’’ ont un mouvement assez répandu en Afrique de l’Ouest. Ici au Sénégal, ils ont des représentants. Un de ses collèges délégués de quartier fait même partie de leurs représentants.
« Il y a environ une dizaine d’années, la Dic (division des investigations criminelles) m’avait convoqué pour me demander si j’avais remarqué la présence de ces gens dans mon quartier. Je leur avais dit qu’à ’’Makatal Moukarama’’ où je suis délégué, il n’avait pas d’étrangers. Pour dire vrai, à l’époque je ne les connaissais pas. Et ils ne fréquentaient pas le quartier », renseigne délégué Dia. Qui ajoute : « jusque-là, je n’ai pas vu ou entendu qu’ils ont posé un acte qui est contraire à la loi. Mais aussi, je ne sais réellement pas leur but ».
Le soutien de l’imam
En tenant des discours religieux qui accroches, ces ’’Pakistanais’’ ont fini par convaincre l’imam la mosquée de ’’Makatal Moukarama’’. Imam Gaye, contrairement aux précédents, n’a aucun doute sur la présence de ces étrangers dans « sa » mosquée. Ce septuagénaire, visiblement dépassé par les questions de l’heure, déroule le tapis rouge à ces Pakistanais. « Ils sont des musulmans. Ils véhiculent toujours de bons discours religieux. Ils ne parlent que de l’islam, le Prophète et le Coran », renseigne imam Gaye. Il poursuit : « A chaque fois, ils viennent avec leur ravitaillement. Durant leur séjour dans les locaux de la mosquée, les habitants du quartier ne leur fournissent absolument rien. Chaque fois, avant de rentrer, ils me remettent leur participation sur la facture du courant et de l’eau ». Difficile de savoir si ce n’était qu’un appât…