Remplaçant au coup d’envoi, Demba Ba est devenu le héros de ce PSG-Istanbul Başakşehir en demandant à l’ensemble des joueurs de rentrer au vestiaire à la suite des propos racistes du quatrième arbitre. Un message entendu. Et donc un message fort.
Confortablement assis sur le banc, Demba Ba pensait attendre la seconde mi-temps pour devenir le héros de la soirée. Comme il a pu le faire en 2014 en quarts de finale de Ligue des champions avec Chelsea en éliminant son « club de cœur » du PSG d’un but du tibia. Finalement, l’attaquant de Başakşehir s’est levé de son banc dès le premier quart d’heure pour enfiler sa cape de héros. Et cette fois-ci, il n’était pas question de ballon envoyé au fond des filets.
Alors que l’entraîneur adjoint Pierre Webó a été victime de propos racistes de la part du quatrième arbitre, Demba Ba a pris le temps d’analyser la situation avant de surgir. Sans s’énerver, l’international sénégalais a alors expliqué à l’arbitre en question pourquoi ses mots sont intolérables qu’il ait utilisé « negro » ou « negru » (noir en VF) : « En parlant d’un joueur blanc tu dis « this guy » et non « this white guy » donc pourquoi tu dis « this black guy » pour parler d’un joueur noir ? » Voyant l’arbitre principal stoïque, Demba Ba a alors demandé à ses coéquipiers de rentrer au vestiaire. Coéquipiers qui l’ont suivi sans réfléchir, tout comme les Parisiens dont Presnel Kimpembe avait, lui aussi, demandé à rentrer au chaud.
Que Demba Ba soit à l’initiative de ce geste fort n’est finalement pas une surprise. Il y a quelques mois, alors que Romelu Lukaku avait été victime de cris de singe du côté de Cagliari, l’ancien buteur de Chelsea s’était révolté sur Twitter : « Voilà la raison pour laquelle j’ai décidé de pas jouer en Italie lorsque j’en avais la possibilité. À ce stade, j’espère que tous les joueurs noirs vont quitter ce championnat. Cela n’arrêtera certainement pas leur stupidité et leur haine, mais au moins ils n’affecteront pas les autres races. »
Un engagement de longue date
Quelques mois plus tard, c’est le sort des Ouïghours, persécutés en Chine par le régime de Xi Jinping, qui inquiétait Demba Ba sur BBC Sport : « Quand allons-nous voir le reste du monde défendre les musulmans ? Je sais qu’il y a des footballeurs qui veulent se battre pour la justice, qu’ils soient musulmans, bouddhistes, chrétiens ou de tout autre croyance. En tant que sportifs, nous avons un pouvoir que nous ne connaissons même pas. Si on se réunit et qu’on parle, les choses changent. Si nous nous levons, les gens se lèvent avec nous. S’il y avait eu un risque financier pour Black Lives Matter, cela ne serait pas arrivé. Arsenal a parlé de Black Lives Matter, mais quand il s’agissait de vies ouïghoures, Arsenal n’a pas voulu en parler à cause de la pression et de l’impact économique. Quand il y a des bénéfices financiers, certaines personnes ferment les yeux. L’argent a plus de valeur que les valeurs réelles. » Et des valeurs réelles, Demba Ba, lui, en est rempli. Fidèle à ses convictions, l’attaquant de Başakşehir ne s’est jamais caché, sans penser aux conséquences de ses propos. Et ce n’est pas à 35 ans qu’il va changer.
Et maintenant ?
Connu, lui aussi, pour son engagement contre le racisme, Samuel Eto’o avait confié à la Gazzetta dello Sport la marche à effectuer en cas de débordement : « Bien sûr qu’il faut quitter le terrain. Le football déplace beaucoup d’argent, mais la plupart des acteurs qui l’engendrent sont noirs. Si un jour avec l’appui des joueurs blancs, ils décidaient de ne pas jouer ici, je pense que tout changerait rapidement. » Si la suite des évènements donnera raison ou non à l’ancien attaquant de l’Inter, il a tout de même dû être fier de voir l’ensemble des joueurs d’Istanbul Başakşehir et du Paris Saint-Germain répondre à l’appel de Demba Ba de rentrer au vestiaire. Sauf que l’international sénégalais n’a pas arrêté son combat une fois au chaud. C’est en partie lui qui a dicté la suite des évènements en se rendant notamment dans le vestiaire parisien pour discuter de la suite à donner. Demba Ba aurait alors eu l’idée d’un geste fort, celui de revenir sur le terrain avec les joueurs des deux équipes qui entrent main dans la main. Devant le refus de l’UEFA et de certains de ses coéquipiers, le natif de Sèvres a alors fait son sac pour rentrer à son hôtel. Où il pourra passer à la prochaine étape : envoyer un nouveau message contre le racisme sur les réseaux. En espérant que cette fois-ci, il sera écouté.
Infosrewmi avec emedia