Escrime – Entretien exclusif avec Ndeye Bineta Diongue, qualifiée pour les JO Tokyo 2021 : « Aujourd’hui, des larmes de joie coulent … »
Après plus d’une dizaine d’années de pratique d’Escrime, Ndeye Bineta Diongue, 33 ans, est qualifiée aux Jeux Olympiques de Tokyo-2021 pour la première fois. Sa carrière d’épéiste désormais jonchée riche en exploits et médailles surtout après cette qualification, elle a accepté de nous en parler dans cet entretien qu’elle a bien voulu nous accorder.
Pouvez-vous nous faire votre présentation ?
Bonjour à vous. Je m’appelle Ndèye Bineta DIONGUE, Je suis née à Dakar où j’ai grandi, étudié et débuté ma carrière d’escrimeuse. Je suis issue d’une grande famille composée d’un père d’origine « Lébou » de GOROM et d’une mère « Toucouleur » de DIOURBEL. Avec une famille de sportifs amateurs, j’ai voulu aller plus loin et devenir sportive de haut niveau. Je suis compétitrice dans l’âme et j’ai toujours été perçue comme le garçon manqué de la famille (Rires). Je suis une femme hyperactive qui aime beaucoup le bricolage et les travaux domestiques.
Pouvez-vous nous retracer votre parcours ?
Je suis escrimeuse épéiste depuis l’âge de 12 ans. J’ai commencé à faire de l’escrime en 2000 avec le Fort B Escrime Club créé par le maitre Sidy Gallo Diop un collègue à mon père qui était dans l’Administration pénitentiaire et par ailleurs Maitre d’arme entraîneur en escrime a été le premier à repérer notre motivation et notre savoir-faire. Il nous a proposé de nous initier à la pratique de l’escrime. Nous en avions fait notre passe-temps favori après l’école. Il nous a donné le goût de progresser car il a su déceler notre potentiel. Il nous a encouragé à participer à des compétitions au niveau local, puis national.
« J’étais médaillée de bronze individuelle en 2008 et 2019 aux championnats d’Afrique »
J’ai intégré l’équipe nationale sénégalaise d’Escrime en 2006 grâce à ma motivation, ma détermination et mon travail sans relâche. J’ai été plusieurs fois championne du Sénégal, j’ai gagné des opens et coupes. J’ai passé ma formation de maître d’arme à Dakar en 2014 grâce à la Fédération Sénégalaise d’Escrime (FSE) que je remercie au passage. J’étais médaillée de bronze individuelle en 2008 et 2019 aux championnats d’Afrique et plusieurs fois médaillée par équipe.
Daniel LAVAVASSEUR, un véritable guide pour elle …
Je m’entraine à Saint Maur des Fossés avec la TEAM LEVAVASSEUR Escrime Club depuis 2014 quand j’ai eu l’immense privilège de rencontrer l’éminent Maitre Daniel LEVAVASSEUR avec qui j ai fais plus d une dizaine de compétition internationale et de stage dans le monde. J’ai participé à des championnats de France par équipe avec différents clubs dont la VGA de Saint-Maur-des-Fossés et le club escrime de Bordeaux. Depuis 2 ans je suis membre de l’As Bondy escrime dont je remercie le président et ses collaborateurs de m’avoir donné l’opportunité d’évoluer au sein de leur structure.
Est-ce que vous avez un lien particulier avec l’épée ? Pourquoi l’avoir choisi ?
Depuis toute petite j’adorais regarder les films d’action tels que « Zorro » ou « Xena la Guerrière » et je me reconnaissais beaucoup en eux (Rires). Du coup je m’amusais avec mes amis d’enfance à jouer avec des bâtons ou des branches d’arbre. Mon histoire pour la pratique de cette discipline est marquée par le fait que l’escrime est un sport de combat où on a besoin de faire bouger tout son corps. Le combat avec l’épée demande concentration, précision et a suscité mon engouement, le besoin d’appartenance à ce sport. Compétitrice dans l’âme, j’ai ressenti cette adrénaline qui me transportait pendant qu’une grande passion naissait.
Quel évènement vous a le plus marqué durant votre carrière ?
L’événement qui m’aura le plus marqué de ma carrière : les phases éliminatoires lors ces qualifications Zone Afrique aux JO de Tokyo pour lesquels je me suis démarquée pour ravir la première place du classement. En effet, ce moment tant attendu et rêvé est survenu lorsque j’ai mis la dernière touche de match qui m’a fait gagner mon ticket olympique.
Les félicitations du peuple sénégalais
J’ai été peinée de ne pas avoir pu serrer à cet instant précis dans mes bras mon entraineur maitre LEVAVASSEUR absent pour des raisons indépendantes de sa volonté et sans qui je ne serais pas arrivée là où je suis aujourd’hui. Le fait de savoir qu’il regardait la compétition en direct et explosait de larmes de joie quand j’ai été qualifiée, me faisait énormément plaisir et me rendait fière d’être son élève. En même temps, j’ai noté l’engouement de mes coéquipiers, mes proches, des membres de la diaspora et de tous sénégalais qui se sont unis pour me transmettre leurs félicitations et encouragements pour la suite. L’euphorie médiatique suscité par cet événement m’a laissé sans voix, avec que de bonnes surprises, de beaux témoignages et de soutiens.
Qualifiée pour les JO quels sont vos impressions et objectifs ?
Ce fut une immense satisfaction d’avoir transformé un rêve d’enfance en réalité et relevé un challenge, si je puis dire après plus de 13 ans de travail acharné. Le chemin fut long et tumultueux mais j’ai su rester résiliente. J’ai connu des hauts, des bas… des difficultés de toutes sortes, des déceptions, des sacrifices mais également le bonheur de la persévérance. Aujourd’hui des larmes de joie coulent quand je vois que tous mes efforts ont fini par payer. En me qualifiant pour les JO de Tokyo, j’ai senti au plus profond de moi cette fierté nationale s’épanouir espérant ne pas m’arrêter en si bon chemin. Je suis remplie de reconnaissance envers toutes les personnes qui m’ont toujours entouré et cru en moi, en mes compétences.
C’était une compétition que j’ai préparée pendant très longtemps et de manière rigoureuse avec l’appui de mes entraineurs, maitre Levavasseur et son adjoint maitre Karam. J’étais bien entrainée et surtout prête à aller chercher cette victoire tant attendue. Les qualifications de 2021 ont été compliquées avec la situation pandémique et les protocoles contraignants. Malgré cela, il y avait une très bonne organisation et la compétition s’est déroulée dans de très bonnes conditions au Caire.
Merci à la FSE de m’avoir apporté son soutien facilitant cette participation.
La compétition en elle-même était difficile et stressante car j’avais conscience que je n’avais pas droit à l’erreur sur aucun des matchs. Je me suis déployée à fond grâce à une bonne formation et une expérience notable j’ai pu faire la différence en saisissant mon unique chance de me qualifier en gagnant la première place. J’avais mis la barre haute, je l’ai franchie avec brio et j’en suis satisfaite en attendant la suite.
Déjà au travail pour arriver à Tokyo avec le meilleur niveau pour la compétition
Depuis la qualification les entrainements se sont intensifiés considérablement. Malheureusement je n’ai pas pu prendre part au premier stage de préparation qui a lieu en ce moment du 4 au 12 mai en Italie. Le programme n’a pu être établi que peu de temps avant cette date, ce qui ne me laissait pas beaucoup de temps pour y prendre part.
Avec wiwsport.com